PLF 2018 : "Il est aberrant de mettre les maisons de l’emploi en difficulté" (M.-P. Establie, Alliance Villes Emploi) Par Eva Thiébaud

Marie-Pierre Establie d’Argencé, déléguée générale de l’AVE
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"Les élus sont surpris", déclare à l’AEF Marie-Pierre Establie d’Argencé, la déléguée générale d’Alliance Villes Emploi à la suite de la publication du PLF 2018. Selon les documents budgétaires, 10,5 M€ sont prévus en AE et CP - soit la moitié de ce qui avait été budgété en LFI 2017 et 2016 pour les maisons de l’emploi. "Les montants prévus au PLF 2018 doivent permettre d’accompagner le retrait progressif de l’État, selon un plan d’action à définir dans les territoires, en lien avec les collectivités territoriales et les maisons de l’emploi", indique le projet de loi. Pour défendre son réseau face à ces diminutions annoncées, la déléguée générale plaide pour une approche territoriale dans le traitement des questions liées à l’emploi. Selon elle, le nouveau système d’évaluation selon une grille des maisons de l’emploi a notamment permis de valider la qualité des prestations apportées.
AEF : Comment réagissez-vous à la baisse des crédits annoncés dans le PLF 2018 concernant les maisons de l’emploi ?
Marie-Pierre Establie d’Argencé : Les élus sont surpris. Les maisons de l’emploi sont des outils d’ingénierie territoriale : elles travaillent notamment sur les clauses d’insertion, les diagnostics territoriaux, la mise en place de partenariats ou l’ingénierie de la formation. Ces outils sont indispensables car on ne peut traiter des questions d’emploi sans les territoires. D’autant que les maisons de l’emploi sont les seules à exister dans ce domaine.
En outre, il s’agit d’outils efficaces : depuis 2016, nous sommes soumis à une grille d’évaluation avec des critères très précis (lire sur AEF). Les maisons de l’emploi doivent atteindre une certaine note, sous peine de voir supprimer leurs crédits en provenance de l’État. Nous sommes favorables à cette appréciation, car effectivement certaines maisons de l’emploi ne tiennent pas la route. En outre, cela permet de démontrer la qualité du travail de la majorité d’entre elles, puisque seule une dizaine – sur 126 au total - s’est vue retirer sa subvention. Mais la suppression de la moitié des crédits dans le PLF 2018 alors que nous avons démontré la qualité de nos prestations nous rend cette décision particulièrement injuste.
AEF : Quelles conséquences pourrait avoir cette diminution ?
Marie-Pierre Establie d’Argencé : Les maisons de l’emploi travaillent à la réalisation des politiques menées par le gouvernement actuel. Le 30 juin 2017, le premierComité national stratégique des clauses sociales voyait le jour, auquel participe activement le réseau Alliance villes emploi. Il est aberrant de nous mettre en difficulté alors que nous collaborons à ce comité. Dans le futur, le gouvernement prévoit un grand plan d’investissement pour l’emploi et la formation, à hauteur de 15 Md€ (lire sur AEF) ; il devra donc forcément s’appuyer sur des outils d’ingénierie territoriale, comme les maisons de l’emploi. Au final, même si ces maisons disparaissaient, elles devraient finalement forcément réapparaître, sous une autre forme ou avec un autre nom.
Enfin, de façon très pragmatique, les MDE emploient 1 200 salariés qui risquent de se retrouver au chômage.
AEF : Comment imaginez-vous défendre votre réseau ?
Marie-Pierre Establie d’Argencé : Plusieurs élus ont déjà pris la parole pour nous défendre, comme la maire de Nantes Johanna Rolland (PS) pendant la 28e convention nationale de l’intercommunalité la semaine dernière (lire sur AEF), ou François Rebsamen (PS), président de Dijon métropole et la présidente de la MDE de Dijon, Océane Charret-Godard (PS), qui ont écrit à la ministre du Travail, Muriel Pénicaud.
Aujourd’hui, nous travaillons à sensibiliser les députés à notre action, en espérant que le PLF soit amendé et notre subvention abondée.
[(10,5 M€. C’est le montant prévu pour les maisons de l’emploi dans le PLF 2018, en AE et CP. "L’État prévoit d’adapter en 2018 sa participation au financement de ces structures, dans le prolongement du mouvement engagé depuis plusieurs années de resserrement des conditions de subvention", peut-on lire dans les documents budgétaires. "Les montants prévus par le PLF 2018 doivent permettre d’accompagner le retrait progressif de l’État, selon un plan d’action à définir dans les territoires, en lien avec les collectivités territoriales et les maisons de l’emploi", est-il encore écrit.
Pour mémoire, considérant que les MDE avaient rempli leurs objectifs (voir le PLF 2017), la LFI 2017 prévoyait 21 M€ en AE et CP - soit la même somme qu’en LFI 2016. Au final, en exécution 2016, 13,61 M€ avaient été consommés en AE et 18,78 en CP, selon le RAP 2016.)]