C’est un vieux serpent de mer, qui refait surface à intervalle régulier, un peu comme le monstre du Loch Ness (car c’est assez monstrueux) : les ML vont-elles fusionner avec Pôle-Emploi ? Ou plutôt être absorbées vu la différence de taille entre les structures. En ce moment, c’est en Picardie qu’on entend ce genre de chose. Rassurons-donc immédiatement le réseau avant que cela ne devienne la rumeur de l’été : il n’y a aucune chance !
D’abord, si le Synami ne dispose pas d’un réseau d’espionnage aussi tentaculaire que celui des Etats-Unis, il est peu probable que la préparation d’une telle révolution échappe au réseau CFDT. Il n’y a donc rien en route du côté des décideurs. Évidemment, on ne s’engage pas sur les éventuelles conversations de café du commerce à la brasserie d’en face.
Ensuite, on ne va même pas parler de l’intérêt supposé de l’opération, regardons juste ce qui rend de toute façon impossible cette fusion :
- Pôle-emploi est en « super forme », ça se sait. Il s’ennuierait presque, on trouve sans doute qu’il n’y a plus assez de problèmes à régler après la fusion Anpe/Assédic, est qu’il est temps de remettre du « pataquès » dans le nourrain.
- Intégrer les 11 000 « gueux » des ML est une excellente idée pour leurs salaires. L’alignement sur la grille de Pôle Emploi conduirait en effet à une augmentation de 10 à 15% pour eux. C’est d’ailleurs ce que revendique le Synami (mais sans passer par la fusion !). « Curieusement », on voit mal l’Etat en ce moment faire d’aussi beaux cadeaux salariaux.
- S’il faudrait trouver un peu d’argent pour augmenter les salaires, il faudrait surtout en trouver beaucoup pour payer à la place des collectivités locales ! Qui en effet imagine que régions, départements, communes et communautés d’agglo, vont basculer leurs subventions actuelles des ML vers un organisme d’Etat dans lequel elles n’ont strictement aucune influence ! L’Etat devrait donc juste trouver entre 250 et 300 millions d’euros pour compenser leurs départs.
Mais, au-delà de ces aspects financiers, qui après tout ne devrait pas être un obstacle si le sujet a du sens, et en oubliant les questions de désorganisation que cela provoqueraient - pas très futé avec cette explosion du chômage - il y a un dernier argument imparable qui calmera toute velléité de fusion : La fusion des fichiers. Car fusion des ML et de Pôle-emploi, cela signifierait forcément celle des outils informatiques et des bases. Et là on est tranquille : quel est le gouvernement qui voudra rajouter dans la liste officielle des chômeurs les centaines de milliers de jeunes inscrits dans les ML et pas inscrit comme demandeur à Pôle-Emploi. A notre humble avis, ce gouvernement n’est pas près d’exister !
Le retour régulier de ces rumeurs et fantasmes est l’un des phénomènes les plus étranges du réseau. On sait bien que l’illusion de régler les problèmes de fonds par des mécanos institutionnels est assez répandue dans ce pays. Ajoutons que nos mécanos sont souvent convaincus que faire plus gros et plus centralisé est plus efficace, malgré quelques démentis brutaux de la réalité (mais les approches idéologiques n’ont que faire de la réalité). Même la Députée Monique Iborra, dans son rapport sur le Service Public de l’Emploi, qui est assez extravagant pour proposer la fusion ML/Ecole de la 2ème chance, ne s’aventure pas dans ses chimères (Le rapport parlementaire « Iborra » ; pour les ML, un coup pour rien).
Il est tellement évident que ML et Pôle-emploi ne sont pas mariables qu’il reste assez étonnant de voir le sujet resurgir régulièrement. A moins qu’un jour, peut-être, Pôle-emploi se territorialise et adopte l’approche globale, qui après tout ne devrait pas être réservé qu’aux jeunes.... Ce n’est pas demain la veille,
Par contre, ce qui est déjà à l’œuvre, dans un certain nombre de ML, c’est bien leur « Pôle-emploi-isation », avec des gouvernances qui assument la fin de l’approche globale, et des managements qui ont totalement sombré dans la politique du chiffre. Cela, malheureusement, ce n’est pas une rumeur pour cet été.